Michael Hanchett-Hanson
Michael Hanchett Hanson est psychologue du développement, directeur du master “Concentration en Créativité et Cognition” au Teachers College de Columbia ; membre fondateur et secrétaire de l’International Society for the Study of Creativity and Innovation (ISSCI) ; rédacteur en chef exécutif de la série Routledge Creativity in Practice ; et président de Contexts R+D Inc. Michael est l’un des principaux défenseurs des modèles participatifs pour la créativité, qui examinent le développement de la créativité au sein de systèmes sociaux et matériels complexes. Il a écrit sur les pratiques éducatives, l’histoire de la notion de créativité en psychologie, les pratiques créatives dans la construction de soi, ainsi que sur les avantages et les inconvénients de l’utilisation de l’idée de créativité par les éducateurs.
— Dans le cadre de sa 5ème saison – l’équipe du StoryTANK a souhaité tenter une nouvelle expérience, sous la houlette de 6 chercheurs captivés et captivants. Il s’est agi de tester et filmer le surgissement d’idées de récits dans des dispositifs expérimentaux créés par LA FABRIQUE DES MONDES, dispositif unique en Europe qui se construit au Groupe Ouest depuis 2023, sous l’égide du Ministère de la Culture français.
L’expérience a été proposée à 6 scénaristes ou cinéastes, venus de 6 pays d’Europe. Le StoryTANK permet ici d’explorer et éclairer la pratique.
Décryptage, ci-dessous, par Michael Hanchett-Hanson , au fil de son retour d’expériences.
DISSOCIER ET ASSOCIER LES COMPOSANTES DU RÉCIT
«C’est le concept du rhizome qui est fondamental pour la fabrique du récit.»
Pour la composition du récit, comme pour L. S. Vygotskij sur l’imagination, il y a une continuelle dissociation et association/recombinaison. L’idée est de sortir un élément de son contexte pour le mettre ailleurs, ce qui fait indéniablement réfléchir différemment. C’est le concept du rhizome qui est fondamental pour la fabrique du récit. On construit sans cesse une carte d’associations de mots, que l’on démonte et reconstruit. Ensuite, on coupe et on remet tout ensemble, puis on prend les choses que l’on a assemblées. Et on construit continuellement. Dans les processus de création, notamment dans la composition du récit, on doit permettre à l’auteur·trice d’accéder à un inconscient, à cette urgence qui pousse à faire les choses, sans trop réfléchir, en immersion. Les étapes de composition du récit, pensées comme un ensemble rhizomique, sont essentielles pour déployer une histoire.

LE RÉCIT EN TANT QU’ŒUVRE AUTO-GÉNÉRATRICE ?
«Quand on écrit, il y a un moment, assez rapide, où l’œuvre elle-même devient actrice dans le processus.»
Quand on écrit, il y a un moment, assez rapide, où l’œuvre elle-même devient actrice dans le processus. Laisser le récit lui-même devenir la source de sa propre élaboration, comme une machine auto-génératrice.
LA GROTTE
THÉORIE DE GRUBER SUR LA RÉPÉTITION CONSTRUCTIVE
«Les fluctuations, les amplifications des écarts ressortent.»
Au sein de la Grotte, peut se déployer l’idée que Howard E. Gruber et plusieurs autres chercheurs en créativité ont explorée, à savoir la répétition constructive. Si on refait quelque chose, encore et encore, très vite – et je pense toujours à Van Gogh, qui a peint les Tournesols très rapidement –, on n’a pas le temps de se corriger. Ainsi, les fluctuations, les amplifications, les écarts ressortent. En passant, très rapidement d’une chose à une autre, encore et encore, on explore, encore davantage, le récit en composition.

LA FABRIQUE DES MONDES
DONNER UNE TEXTURE AU RÉCIT
«Ce qui est remarquable, au fil des dispositifs expérimentaux de LA FABRIQUE DES MONDES, est la faculté d’écouter le monde.»
Ce qui est remarquable, au fil des dispositifs expérimentaux de LA FABRIQUE DES MONDES, c’est la faculté d’écouter le monde, d’avoir cette capacité à réellement voir ce que l’on produit et de comprendre comment cette vision intérieure s’exprime à l’extérieur et, comment cette expression renseigne la manière dont on commence à penser le récit.

COMPRENDRE COMMENT LE RÉCIT SE COMPOSE
«Au fil des expériences, se crée collectivement une sorte de musique narrative où chacun·e s’exprime dans le processus global, avec un rythme plus ou moins instrumental et percussif.»
Dans LA FABRIQUE DES MONDES, au fil des expériences, se crée collectivement une sorte de musique narrative où chacun·e s’exprime dans le processus global, avec un rythme plus ou moins instrumental et percussif: il n’y a probablement pas de bonne réponse, mais ce qui compte, c’est de comprendre comment la musique et donc le récit fonctionne. De comprendre ce qui se passe lorsqu’on fait des choses très courtes, plus longues, et d’observer comment les gens interagissent.